Giorgio Vigolo

Mercredi 22 novembre 2017
de 19h à 21h
à l’Espace Martin Luther King
27 boulevard Louis Blanc à Montpellier
Tram ligne 1 , arrêt Corum

Nathalie Castagné  écrivain et traductrice

nous parlera de  sa rencontre avec ce texte étonnant et en dehors du temps, dans une Rome envoûtante.  un véritable chef-d’œuvre, La Virgilia de Giorgio Vigolo.
Giorgio Vigolo a écrit La Virgilia entre 1921 et le printemps 1922. Il avait 27 ans. C’est en 1982, année précédant celle de sa mort, qu’a été publiée cette œuvre, poème autant que longue nouvelle ou court roman.

Cet écart de soixante ans résulte d’une mise au secret, puis d’une soudaine lecture faite par Vigolo à Pietro Cimatti, écrivain et poète de plus de trente ans son cadet, « un soir d’hiver à Rome », révèle celui-ci dans son introduction à l’édition italienne, enfin la réaction enthousiaste de Cimatti à cette lecture, qui emporta la décision de Vigolo, en faisant tomber ses craintes de n’être pas entendu, sans doute même d’être rejeté dans ce qu’il livrait de plus aventureux et sans doute, sous le voile de la fiction, et par ce qu’elle permet de libérer, d’éminemment, de suprêmement personnel.

J’ai découvert La Virgilia en octobre 2008. Vigolo a intitulé l’un de ses recueils La città dell’anima, et c’est ainsi que je suis d’abord entrée dans ce livre : comme dans un lieu intérieur, que je ré-arpentais à travers ses lignes, un lieu étrangement familier et dont en même temps résisterait toujours l’épaisseur ou la stratification du mystère. Au détour de ces rues de la Rome ancienne, m’attendait, sous forme de Journal d’un jeune musicien érudit du XIXe siècle, une histoire entremêlant amour par-delà les siècles et accents d’un instrument mystérieux, dont tout me parlait ; une histoire fantastique et initiatique, un grand rêve, pourrait-on dire aussi, à condition d’entendre dans ce mot la puissance d’une plongée et d’une traversée au-delà des limites illusoires du moi, et non la faiblesse de l’évasion.

Le rêve tel que l’entendaient les romantiques, les vrais : les métaphysiques, loin des sentimentaux. Vigolo, poète (reconnu par certains, en Italie, comme l’égal de Montale, de Saba, d’Ungaretti), essayiste, musicologue, a été traducteur de Hölderlin. Ce qui fait la spécificité de La Virgilia est aussi la présence constante, dans son inspiration et dans sa trame, d’influences a priori contradictoires : partout s’y révèle une association très singulière entre romantisme allemand et grande tradition de l’humanisme latin.

Ce roman, ce roman si longtemps caché, comme arraché au tombeau à l’instar de sa protagoniste – dont l’empreinte immortelle va en un finale extraordinairement poétique et visionnaire apparaître, descellée du cercueil, dans ce que le narrateur appelle « la transgression des lois inviolables du Temps et de la Mort » ; mais c’est moins à une transgression qu’on assiste, qu’à sa transmutation lumineuse en une révélation de la Beauté –, comme arraché au tombeau donc juste avant la mort de son auteur, est le seul qu’ait écrit Vigolo. Mais il a écrit de nombreuses nouvelles, et dans plus d’une d’entre elles se trouvent des échos de cette Virgilia tenue au secret.


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